Lettres du Docteur Lamote

Lettre N° 14

Gaby écrit :

Ganga Nzombe, 24-03-1937

Joyeuses Pâques ! Nous vous envoyons un peu de soleil, car il paraît qu’il pleut beaucoup chez vous.

En ce moment, nous nous attendons à un gros orage. Le ciel est noir, un épais brouillard remplit les vallées qui entourent notre plateau. Il pleuvine et dans le lointain tonne l’orage.

Dans un quart d’heure, nous vivrons autre chose !

Des trombes d’eau, et bientôt nous devons nous réfugier sous la tente. Tantque le vent, ne se lève pas, il est possible de rester ici devant dans le sombolo. Sinon, la pluie s’engouffre de toutes parts, comme dimanche dernier. 

Dimanche nous avons vécu un terrible orage.

Eugène était parti à la Mission depuis le matin pour une urgence (7 heures de tipoy).

J’étais donc seule. Tout a commencé vers 14 heures jusqu’à 17 heures. La pluie déferlait, les éclairs et les tonnerres se succédaient sans cesse. De tous côtés la flotte envahissait le sombolo. Un véritable ouragan.

Si j’avais peur ? J’ai vraiment tremblé. Et j’en tremble encore maintenant, car la foudre est tombée ici tout près. Ça recommence comme dimanche.

Le pire est actuellement passé. Sept coups de tonnerre  sont tombés à proximité, probablement sur l’antenne de notre radio. Il y a vraiment de quoi avoir la trouille !

Et les Noirs en ont peur aussi ! Je l’ai constaté dimanche. J’avais demandé à Michel, le plus grand des boys, et au petit boy de rester près de moi dans le sombolo. Nous nous sommes tapis sous la tente et vous auriez dû voir comment nous étions recroquevillés de peur !

Nous n’osions plus bouger.

 

 

 

L’endroit est superbe. Nous nous trouvons sur la hauteur. Les vallées autour de nous sont couvertes de milliers de palmiers. Une véritable richesse en noix de palmes. Au-delà, des montagnes chauves où on aperçoit ci et là un petit village.

 

Tout près d’ici, se trouve encore un plateau avec une vue magnifique. C’est là que nous aimerions voir notre maison

 

A propos de maison, elle est renvoyée continuellement aux calendes grecques et l’Administrateur qui nous rendait visite hier, nous disait que l’Agent territorial qui allait faire construire la maison devait encore venir d’Europe !

Oui, le Congo, n’est-ce pas très ridicule ?

Pour nous consoler, nous avons acquis une radio. Question de ne pas retourner à l’état sauvage.

Dorénavant nous connaissons la température qu’il fait en Campine et à Bruxelles. Nous suivons les débats du Sénat... Enfin, un peu de musique vous retape un homme dans cette vie monotone.

Oui, la radio fonctionne sur une batterie de voiture de 6 volts.

Une fabrication américaine « Airline », joue très bien et n’est pas trop chère (2.600 Fr.). Elle vaut son prix pour le plaisir qu’on en retire.